Marc Bienemann est le Managing Director de Jaguar Land Rover Benelux. Dans une longue interview octroyée au magazine FLEET à paraître fin du mois, l’homme a parlé franchement de tous les sujets, y compris les plus difficiles. En voici un extrait…
Jaguar Land Rover a connu un incroyable développement ces dix dernières années. Mais aujourd’hui, un grain de sable s’est glissé dans la mécanique. Le Brexit, un marché chinois en déclin, 4.500 licenciements… Comment se profile le futur ?
Ces dix dernières années, Jaguar Land Rover a en effet enregistré la plus importante croissance de son histoire. Au niveau du Benelux, nous sommes passés de 8.000 à 18.000 voitures. Et cela grâce à l’introduction de nouveaux modèles, tant chez Jaguar que chez Land Rover.
Mais comme vous le savez, ce n’est pas nécessairement la panacée dans ce secteur. Aujourd’hui, nous sommes en phase de stabilisation. Les bénéfices prévus pour cette année se situent aux alentours du milliard d’euros. Mais en Chine, les résultats des ventes ont été décevants et l’on se dirige plutôt vers un break-even.
“Notre groupe ne devient donc pas soudainement une entreprise en difficulté.”
Il a donc été décidé d’agir en amont et de prévoir 3,5 milliards de pertes. C’est une décision comptable qui n’a en fait rien à voir avec les circonstances actuelles. Par ailleurs, nous avons également investi cette année 4 milliards d’euros dans de nouveaux produits et de nouvelles usines. Tous les modèles prévus vont donc arriver.
Notre groupe ne devient donc pas soudainement une entreprise en difficulté. Nous avons dû réduire les coûts et le personnel, mais c’était nécessaire afin que les marques et l’entreprise soient parées pour l’avenir. Choisir l’autre solution, c’est-à-dire ne rien faire et hypothéquer l’avenir, aurait été simplement de la mauvaise gestion.
Ce ne doit pas être facile de licencier des personnes avec qui vous avez collaboré durant des années ?
Nos marques possèdent un caractère très familial. C’est inscrit dans nos gènes. ‘Difficile’ est donc un terme bien trop faible pour décrire ce genre de décisions. C’est la dernière chose que l’on souhaite faire.
Ce qui rend la situation plus difficile encore, c’est que nous devons supporter sur le plan local les conséquences de ce qui se passe au niveau du groupe, alors que 2018 a été pour la Belgique la meilleure année jamais enregistrée. C’est la première fois que nous avons immatriculé plus de 10.000 voitures. Au Luxembourg, nous avons réalisé 3,5 % de parts de marché, notre meilleur résultat. Pareil pour les Pays-Bas. Avec 6.500 immatriculations, ce fut la meilleure année de notre histoire.
Dès lors, décider de licencier au sein de l’organisation locale laisse un goût encore plus amer…
Quelle sera l’influence du Brexit dans les années à venir ?
Même si l’incertitude prime encore, nous nous sommes bien préparés à tous les scénarios possibles. Nous ne produisons pas seulement en Grande-Bretagne, mais aussi à Graz (Autriche) et à Nitra (Slovaquie).
À Nitra, nous pouvons porter la capacité de production à 300.000 unités. C’est suffisant pour assurer la production de toutes nos voitures, même les modèles actuellement produits en Grande-Bretagne. Nous avons suffisamment alerté les autorités britanniques à ce propos.
Pour Jaguar Land Rover, il pourrait même être positif de voir apparaître une concurrence entre les usines situées sur le continent européen et en Grande-Bretagne. Cela favoriserait le rendement et la qualité de la production.
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