Erik Jonnaert (ACEA): « 2030 ? Les normes CO2 pour 2020 imposent déjà des efforts énormes ! »

Le Belge Erik Jonnaert est Secrétaire-général de l’ACEA, l’Association européenne des constructeurs automobiles. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il a du pain sur la planche. L’UE s’en prend au secteur automobile par le biais de nouvelles réglementations… et cela dans une période où il doit déjà consentir de lourds investissements pour l’avenir. L’industrie automobile pourra-t-elle en venir à bout ? Nous nous sommes rendus au siège de l’ACEA à Bruxelles, pour en parler avec son grand patron…

Ces dernières années, l’UE a imposé à l’industrie automobile des conditions d’émissions strictes, avec des délais courts. Est-ce le Dieselgate qui a accéléré les choses ?

Le Dieselgate a en tout cas provoqué une révolution majeure, menant même malheureusement aussi au dieselbashing ou même au carbashing. Il semble que le secteur ne peut plus rien faire de bien. Mais en fait, une nouvelle façon de tester les véhicules était déjà à l’agenda politique avant le scandale. La WLTP avait déjà été approuvée au niveau international à Genève, mais – comme toujours – l’Europe a souhaité y ajouter ses points et ses virgules. Le Dieselgate a accéléré le processus, ce qui est une bonne chose car nous demandions également une nouvelle procédure de test.

Entre-temps, nous constatons que certains constructeurs éprouvent des difficultés à atteindre l’objectif de 95 g de CO2/km pour toutes leurs marques d’ici 2020. FCA s’est fait remarquer à cet égard en achetant des crédits d’émissions de Tesla. Pensez-vous que ce soit un acte légitime ?

Cela se produit également dans d’autres industries et est également prévu dans la réglementation. Cela ne me pose aucun problème. L’approche de FCA figure sur le radar des médias, mais il ne faut pas oublier que cette pratique est déjà en place via ce que nous appelons le « pooling fermé » : de grands fabricants compensent les modèles haut de gamme à émissions élevées par d’autres modèles de leurs marques et gammes à faibles émissions. FCA est maintenant un exemple de « pooling ouvert », mais si c’est une solution pour éviter des amendes élevées de la Commission européenne : pourquoi pas ?

Si l’on regarde à plus longue échéance, les 95 g de CO2/km en 2020 ne sont qu’un avant-goût de ce qui s’annonce pour plus tard : une diminution des émissions de CO2 de 37,5% pour les voitures neuves à l’horizon 2030, ce qui reviendrait à des rejets moyens de CO2 de 59,3 g CO2/km. L’industrie le supportera-t-elle ? Et si oui, les moteurs thermiques auront-ils encore un rôle à jouer dans ce scénario ?

Dans un scénario idéal, l’électrification devrait nous permettre de respecter ces normes. Mais je constate que la désaffection dont le diesel fait aujourd’hui l’objet ne se traduit pas par une progression importante des véhicules électriques ou hybrides. Prenons l’exemple de la Belgique : plus de voitures essence signifie obligatoirement plus de rejets de CO2. On voit que des organisations comme Transport et Environment affirment par la bande que moteurs essence et diesel émettent autant de CO2 l’un que l’autre, ce qui est faux.

Sur ce plan, le moteur diesel moderne se montre plus performant, ainsi qu’en atteste un rapport de l’Agence Européenne pour l’Environnement. Si l’on fait des comparaisons au sein d’un même segment, on constate que les récentes motorisations essence rejettent de 10 à 40% de CO2 en plus que les nouveaux moteurs diesel. Avant de parler de 2030, force est de reconnaître que les 95 g de 2020 constituent déjà un défi de taille. L’engagement au sein du secteur pour atteindre cet objectif est important, car les amendes en cas d’infraction sont énormes. Or cet argent, nous préférons l’investir dans le développement de modes de propulsion alternatifs.

Les décideurs politiques donnent le ton, mais semblent encore passer à côté de l’essentiel en ce qui concerne le type de propulsion. Est-ce par manque de connaissances techniques ? Quiconque connaissant un peu la technologie actuelle des moteurs sait que les moteurs diesel modernes fonctionnent mieux que l’essence en termes de C02.

Je ne peux que constater que, suite au Dieselgate, aucun homme politique n’ose se prononcer en faveur de la technologie diesel. Conséquences : les qualités des diesels modernes sont purement et simplement niées, non seulement en termes de CO2, mais aussi en termes de qualité de l’air. Il est maintenant de plus en plus évident qu’il n’y aura pas de marché arrière. Une part de marché comme par le passé ne reviendra jamais, mais le diesel restera une option nécessaire dans les années à venir, en partie pour les voitures particulières mais certainement pour les camions.

#Fleet Management #International #Mobility

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